lundi 17 mars 2014

One Chance - Partie 1

Onze heures.
Les quais étaient particulièrement surchargés de monde. A cette heure de la journée, le 24ème arrondissement de Paris peut atteindre des chaleurs insupportables. Il est impossible de faire le moindre pas sans se chevaucher, chaque action prend dix secondes à faire puisque la ville, la rue, le quartier, le trottoir est surpeuplé. Partout, dans le bâtiment, retentissaient les slogans de la Firme et de son Gérant, fraîchement reconduit par les plus hauts gestionnaires financiers du pays.
L'hypertrain de 11h05 arriva à Paris avec dix minutes de retard. Depuis l'apparition des hypertrains en 2230, les voyageurs n'arrivant pas à l'heure sont assez rares, mais cet hypertrain avait un visiteur particulier qui justifiait de son statut de retardataire.
Au milieu d'une foule grouillant sur le quai, isolée dans un des seuls scaphandres libres de la gare, Dolores Sangani guettait d'un œil la "sortie de l'hyp", comme elle avait convenu avec son compagnon. D'un œil uniquement, puisque son rétinécran lui permettait de suivre en parallèle l'évolution de ses données numériques. Elle suivait pèle-mêle les informations, les nouvelles de ses amis et du monde, et avait l'air autant amusée que concentrée sur ces données.
Les premières canicules de mai arrivant, elle avait détaché ses cheveux roux et sorti sa jupe verte d'été, ce qui faisait ressortir encore davantage ses yeux turquoise. Elle avait fait en sorte d'arriver très en avance sur le quai, pour trouver un scaphandre d'accueil disponible, et éviter la cohue de la fosse gratuite en tête de voie.
Son visage s'illumina d'un coup quand Stelio fit son apparition par la porte principale de l'hypertrain. Il était semblable à tous les hommes du XXIIIème siècle: très grand, brun, mat de peau et bronzé en permanence, vêtu de manière quasi unisexe, et d'ailleurs, sa pomme d'Adam hypertrophiée était le seul détail qui trahissait son genre. Il s'avança vers Dolores, lui tomba dans les bras. Depuis que le trajet entre Rome et Paris avait été réduit à une heure, les allers-retours devenaient plus fréquents entre elle et lui, mais il s'efforçait de recréer à chaque fois qu'il lui disait bonjour la magie du premier rendez-vous.
Ils s'efforcèrent tous deux de quitter ce lieu surpollué au plus vite, sans dire un mot, et quand ils furent à l'abri du vacarme de la foule, Dolores prit la parole :

" Comment te sens-tu?
- ...ça pourrait être pire. Tu sais, j'ai eu des années pour m'y préparer.
- Tu dis ça comme si c'était perdu d'avance. Le travail que tu as accompli à Rome risque de changer la face du monde à jamais.
- ...Il y a des chances, conclut Stelio d'un air à la fois désabusé et inquiet.

Après un sandwich vite croqué dans un point chaud, assourdissant et irrespirable, Dolores et Stelio se rendirent dans le quartier Vincennes vers 13h. Ils avaient rendez-vous au Keylab de Logopolis, le laboratoire où travaillait Stelio depuis dix ans déjà, et qui avait un immense amphithéâtre dans Paris.
Stelio devait y tenir une conférence sur les dernières avancées de son équipe de travail, qui avait tout prévu. Le visage de Stelio avait changé depuis l'entrée dans le Keylab : il affichait désormais un maintien assuré, et un air très sérieux. Les inquiétudes du déjeuner avaient laissé place à une assurance certaine, celle que l'on trouve chez les hommes qui sont payés pour faire, et non pas chez ceux qui sont payés pour dire, et encore moins ceux qui sont payés pour être.
5000 scientifiques étaient présents pour assister à cette conférence, et à chaque siège étaient attachés des dizaines d'écrans de toutes origines, pour retransmettre l'événement à travers la planète entière.
Après les formalités et les présentations d'usage, Stelio finit par prendre position devant le micro.

"Mes chers amis,
Notre monde va vivre une véritable transformation. Un changement comparable à la Révolution Industrielle que nous avons connue il y a quatre siècles. L'Histoire va être marquée à jamais, comme elle le fut lorsque le Moyen-Age fit place à la Renaissance, nous entrons dans une nouvelle ère, l'ère de l'homme bionumérique. Nous allons connaître une révolution biologique sans précédent, quelque chose d'inédit dans l'Histoire des Hommes. En effet, avec l'équipe de Logopolis Roma, nous avons créé une molécule numérique contenant tous les anticorps humains connus de ce monde. Les tests que nous avons effectué nous permettent d'affirmer que cette molécule peut être considérée comme un remède efficace à toutes les défaillances du système immunitaire humain. Vous l'aurez compris, les cancers, virus et autres maladies nucléaires ne seront plus que des mauvais souvenirs dans quelques jours. Cette molécule, nous l'avons appelé One Chance".

Et sur l'immense écran derrière lui, on pouvait lire en lettres non moins immenses ces deux derniers mots, dont l'élan d'espoir se ressentait jusque dans l'assemblée présente qui ne pouvait retenir ses embrassades et ses cris de joie.
Stelio termina son discours en expliquant que dès le lendemain, des prises de ce médicament révolutionnaire seront organisées à travers le monde afin de commencer une éradication pure et simple des nouvelles épidémies d'oxyrite qui s'étaient déclarées six mois plus tôt, sur les six continents. Et enfin, une surprise attendait les différents privilégiés présents dans l'amphithéâtre: une dose de One Chance était prévue pour chaque personne,  à administrer immédiatement. La molécule était composée de milliards de bactéries contenant chacune un programme informatique, et par un système de biométal, venant se loger directement dans le système nerveux central, pour reproduire le fonctionnement du cerveau et découler dans les organes malades en cas de contamination.
La fête battait son plein. Stelio était convié à donner des interviews dans toutes les langues connues. Il vagabonda de ville en ville, avec Dolores à son bras, rayonnante, qui ne comptais plus les moments où elle criait de bonheur devant la nouvelle popularité acquise de son compagnon.
La soirée approchant, il fallait raccompagner Dolores chez elle, alors les deux amants prirent la direction de Montmartre, où elle habitait. La nuit tombant, la chaleur était retombée et on recommençait à respirer sans masque dans la ville, et à pouvoir emprunter les rues sans bousculade.
Bras dessus bras dessous avec Dolores, Stelio lui lança :
"Alors, tu te sens mieux depuis cette après-midi?
- Oui! Mais ce n'est pas dû à ta molécule, mon amour.
- ... Tu avais raison.
- Comment ça?
- Je crois que je vais changer le monde."
Dolores éclata de rire et l'enlaça vigoureusement. Puis elle rit, encore, à gorge déployée, alors qu'elle arrivait devant son appartement.
"...Tu veux...monter? " demanda-t'elle, d'un regard qui en disait beaucoup plus.
D'un mot qui en disait beaucoup moins, Stelio la rejoignit dans son joli studio parisien. Il était presque 23h, et les bruits lointains de la ville-lumière se faisaient plus rares. Les deux jeunes amoureux ne se quittaient plus: Dolores était resplendissante, et était décidée à faire fondre Stelio de plaisir. Sans même prendre le temps d'allumer la lumière, elle le plaqua contre le mur, et l'embrassa de tout son corps. Leurs mains et leur langues se cherchèrent dans la pénombre quand le rétinécran de Stelio se mit à clignoter et à émettre un son curieux.
"Enlève-le, gémit Dolores tout en caressant le torse de Stelio sous sa chemise.
- Attends une minute, c'est le boulot. Qu'est-ce qu'ils me veulent à cette heure?
- Mmh. Ils veulent te féliciter...Et moi aussi. Viens, je sais exactement comment je vais m'y prendre...
- Oui, j'arrive dans une minute, ma douce. Ne bouge pas."

A moitié débraillé, Stelio fila dans la salle de bains, et activa son fil de messages: sa boîte interne était pleine de messages. Stelio marqua un temps d'arrêt: près de 50 messages en moins d'une heure, c'était alarmant. Il choisit l'option vidéo sur son scanner pour entendre les différents enregistrements.

"Stelio, c'est Dusan. Viens de toute urgence à Logo. On a fait une connerie."
"Tu es là? C'est Antonio. C'est horrible, nous avons tous merdé. Viens vite!"
...il prit à peine le temps d'écouter en diagonale les autres messages de collègues, tout aussi catastrophés. Il y avait même une intervention de Livio Logo, PDG de Logopolis Roma, qui lui intimait de se déplacer à Rome dans les plus brefs délais.
Stelio fit un pas de recul : que pouvait-il bien se passer sur son lieu de travail?

"Stelio...?" La voix de Dolores résonnait à travers la porte de la salle de bains.
Dans la précipitation, il ouvrit la porte, et poussa un grand cri.
"Dolores !! Mais...qu'est-ce qui t'arrive?"
- Je ne sais pas... j'ai soudain un terrible mal de tête."

Le nez de Dolores était en sang, comme si elle venait de prendre un uppercut en pleine tête. Ses yeux s'étaient également teintés de rouge.
"Aïe...Stelio....j'ai mal...!
- Ne t'inquiète pas, Dolores, ça va aller. Je suis là.
- C'était qui aux lentilles?
- C'est le boulot, une affaire urgente à régler. Je dois filer à Rome.
- Maintenant? Mais c'est de la folie! Aïe....Stelio, ça fait affreusement mal!"
Sur cette dernière phrase, Dolores cracha un filet de sang par sa bouche, et se recroquevilla contre le lit, pour finir à genoux, puis posa ses mains au sol.
- Stelio...je ne me sens pas bien...ne me laisse pas...!
- Je n'en ai pas pour longtemps. Je vais faire venir un docteur tout de suite, je dois vraiment partir.
... Dolores?"
Toujours à quatre pattes, Dolores releva la tête et sans dire un mot, regarda droit dans les yeux son homme, apeuré par son visage déformé par la douleur.
- Ne me laisse pas. Je...Je..."
Ses yeux se révulsèrent d'un seul coup, et elle s'écroula en poussant plusieurs cris de douleur.
Stelio, à cet instant, repassa toute la journée en revue : la gare, le sandwich, le Keylab, le parc, le lit, les messages de Logopolis...tout cela allait trop vite. Il fallait agir d'urgence.
Il utilisa la fonction téléphone de son rétinécran pour appeler un médecin de garde, et reprit sa veste.
Stelio se mis à repasser devant ce lieu qui, il y a quinze minutes à peine, symbolisait tant de bonheur, et désormais représentait la panique, la peur, l'urgence. Les arbres synthétiques redevinrent tout à coup synthétiques avant d'être arbres, les affiches du Gérant reprirent leur air superficiel, et la gare vers laquelle il fonçait à toute vitesse perdait son image magique du matin même pour redevenir un lieu où l'on se presse, où tout paraît trop lent, trop mal fait, trop inutile, et toujours trop fermé.


lundi 10 mars 2014

(A)dicthée.

L'autre jour, j'ai eu envie de boire un café. Et puis je me suis dit : "Tiens, on va changer, je vais boire un thé." J'avais acheté une boîte de thé chez un artisan, c'était l'occasion. Et donc, comme j'étais au sous-sol avec mon amante, je suis monté pour boire mon thé. Attention, quand je dis "je suis monté", je ne veux pas dire "je suis mon thé", que je me prends pour un thé. J'ai déjà du mal à me prendre pour untel ou untel, alors imaginez pour un thé.

Je suis donc monté pour boire mon thé.
Je ne dis pas non plus qu'il y avait, quelque part dans l'immeuble, un thé qui se promenait ça et là dans les couloirs, et que je le suivrais: ça n'aurait pas de sens.

J'ai choisi le sachet "thé au citron".
Et quand bien même il y aurait un thé, il y aurait intérêt à ce qu'il soit suffisamment grand et rapide pour marcher aussi vite que moi, sinon je ne pourrai pas le suivre non plus. Enfin bref.

J'ai continué à monter à l'étage, laissant ici mon amante. Et en m'éloignant d'elle, j'ai atteint le toit. Donc je suis redescendu pour mon thé. Mais tout en descendant, j'étais assez remonté: parce que j'étais en train de perdre mon temps, en descendant plutôt qu'en montant. Heureusement que je n'étais pas un vieillard, parce que j'en aurais conclu qu'on ne se posait pas ce genre de questions de mon temps. Donc quitte à descendre, autant rejoindre mon amante.

"Montons", lui dis-je.
Mon thon, ce n'est pas son petit nom, hein. Elle s'appelle Sophie. En général je l'appelle "mon chat".
"Montons, que je te fasse goûter un beau thé, mon chat."
Et avec moi, Sophie monta.
Mon tas, ça n'a rien à voir avec son physique. De ce point de vue, tout va bien, elle est plutôt bien montée.

Elle est bien montée avec moi. Elle voulait un thé à la menthe. J'ai donc offert un thé à la menthe à l'amante, quand elle me demanda :
" Pourquoi tu m'as fait monter ?"
Après avoir hésithé, je lui répondis :
"Ah, ce n'est pas moi qui l'ai fait. Je l'ai acheté à un artisan libre au bout de la rue qui monte. A Ménilmontant."
- Mais non, s'énerva-t'elle, pourquoi m'as tu fait venir ici?
- Oh là, arrête de monter sur tes grands chevaux. Je t'ai fait monter pour passer avec toi mon temps libre. Et c'est pas pour le prix que me coûte ce temps libre, je ne sais plus combien ce thé m'a coûté.
- Ah bon, ce n'est pas non plus toi qui l'a acheté ?
- Si, mais l'artisan m'a prévenu qu'il me le vendrait à un montant libre. Théo.
- Thé aux quoi ? Thé aux fruits rouges?
- Non, Théo Durand. C'est comme ça qu'il s'appelle."

Je commençais à apprécier mon chaste thé avec mon amante quand je fus interrompu par la sonnerie de mon théléphone. C'était ma meilleure amie Maïté. Elle devait passer me voir à 17 heures,  A l'heure du thé. Son SMS, trés court, disait :
"T ou?". Je sentais une pointe d'opiniâtreté.
Je lui répondis : "Je suis encore chez moi avec Sophie. J'arrive tout de suite. Je finis mon thé et je te laisse finir de monter la rue de chez moi."
Je dus donc laisser là mon thé à l'amante, éhonté, et j'enfilais mon manteau de façon précipithée.

Moralithé : la prochaine fois, je boirai du café.

vendredi 7 mars 2014

Tête à clac

Je n'ai jamais aimé les histoires fusionnelles. Pour moi, mettre un homme ou une femme sur un piédestal, c'est aussi idiot que de mettre l'argent au centre de sa vie ou de faire du sport pour être célèbre.
Mais tu as mis un joyeux bordel dans ma définition du mot "idiot". Je me sens terriblement stupide, à regarder ta photo ce soir.
Qu'est-ce que j'ai bien pu te trouver? Tu n'es même pas mon genre de fille. Tu es maladroite, tu es en constante recherche de toi-même, et je me demande encore si tu te trouveras un jour.
Mais plus je regarde cette photo, plus je comprends notre point commun : nous sommes des futilistes. Des gens qui restent à la surface des choses, qui ne maîtrisons rien. Les sujets d'adultes, c'est pas pour nous. Aujourd'hui par exemple, tu t'es fait belle, tu t'es maquillée pour me plaire. Tout le monde te raillait à cause de ton visage qui brillait, et à cause de ton appareil dentaire. Tu étais à la fois amusée, et pétrifiée.
Mais j'ai voulu te photographier ainsi: parce que c'était toi. Toi, dans ton ensemble, toi qui semble à la fois heureuse et contemplative. Et dans ce monde qui hurle, qui consume et qui congèle en même temps, qui distribue la connerie à la vitesse de la lumière, le seul refuge, au fond, la seule magie, c'est l'arrêt, c'est la contemplation. C'est accepter de s'arrêter, accepter de prendre le temps de savourer chaque petit plaisir de la vie, quoi qu'en dise la masse. Quitte à faire de nous des gens du futile, et que tout le monde se mette à penser qu'on se prend la tête pour rien, ou pour des choses qui n'en valent pas la peine. Parce qu'aujourd'hui, tous ceux qui réfléchissent sont immédiatement rangés dans le camp de ceux qui se prennent la tête. Probablement entre les schizophrènes et les tueurs en série.
Oui, cette photo fait de moi un idiot. Parce que j'en suis amoureux. Et je me tuerais pour être amoureux d'une photo. Mais si je me tuais, ce serait uniquement pour avoir plusieurs vies. Je me tuerais pour avoir cinq vies. Pour pouvoir tomber cinq fois amoureux.
Mais, me connaissant, ce serait cinq fois de la même personne.

Tête à clics

0h00 : Une lumiére éblouissante. Un homme tout en blanc, qui doit sentir le médicament, puisqu'il a des gants. Tout autour est blanc et épuré.

2h30 : De gros barreaux remplissent le paysage, qui se pare de mille couleurs! Il y a des étoiles, des planètes, reliés ensemble par des fils. La photo semble être prise à même le sol.

4h00 : La photo est prise de plus haut, cette fois. Environ un mètre au-dessus du sol. On aperçoit des étagères de meubles, un canapé, et une table trop haute pour qu'on voie ce qu'il y a dessus.

6h30 : Une foule d'enfants rieurs passent dans les couloirs, et dessinent, sur les murs d'un bâtiment qu'on appelle "école", des bonshommes, des soleils et des fleurs.

8h : Image d'un morceau de papier légèrement froissé, avec de drôles de symboles dessinés dessus, des traits et des ronds. Il paraît que ça s'appelle "mathématiques".

12h30 : Instantané d'une fête de Noël. À table avec les "grandes personnes", il y a du saumon, des œufs de lompe, et un gigot d'agneau encore fumant.

17h : Une jolie jeune fille en gros plan. Maquillée de façon maladroite, elle a le visage qui brille. Elle porte un appareil dentaire qu'on devine à peine car elle sourit en pinçant les lèvres.

20h : Une série d'ordinateurs alignés en rang d'oignons. Travaillant dessus, des jeunes hommes et femmes de tous horizons, et un peu plus loin, un homme en chemise blanche: c'est Xavier Niel.

23h : Plan large sur l'aéroport d'Helsinki. Le drapeau finlandais flotte au vent, et la neige s'estompe peu à peu avec le début du printemps.

La carte SD de l'appareil est pleine...vais-je choisir de faire de la place? Ou si j'achète une nouvelle carte, que vais-je photographier dans ma nouvelle vie.
Mh. Je devrais déjà m'attarder sur une de ces photos au hasard.


Souvenir de grand-père

Ce matin ressemble à tous les autres matins. Je me souviens encore de tous mes matins. Je ne sais pas encore pendant combien de temps je pourrai le faire, alors je savoure. Je saisis mon pantalon, qui devient de plus en plus difficile à enfiler. Ah, le marché aux puces de Saint-Ouen, où on trouvait de tout et pas cher, tous les jours. Je crois qu'aujourd'hui c'est un entrepôt d'ordinateurs rétiniens qu'on trouve à la place.
Ah, justement, l'ordinateur. C'est une drôle de machine, ça. Depuis mon plus jeune âge j'en utilise, et je me suis toujours demandé : quelle sera la suite de cela? Au nom de quoi aurait-on pu dire un jour, "non, c'est dépassé"? Comme si naïvement, sous prétexte qu'on entrait dans le 3è millénaire, la technologie s'arrêterait de progresser. Comme si, grâce à cela, je serai pour toujours, comme on disait à l'époque, "dans le coup". Maintenant je suis moi-même celui dont je me moquais à son âge. Les gens aujourd'hui payent avec leurs empreintes digitales, communiquent avec leurs yeux et téléphonent...ah tiens c'est vrai, ils ne téléphonent plus. Il n'y a que les gens de mon âge qui utilisent encore leur voix.
Ah, cette odeur de café dans la cuisine. Ça, bizarrement, ça n'a pas changé. Aujourd'hui il y a une machine qui fait tout à boire et à manger dans la maison, mais j'ai l'impression que les gens, quels qu'ils soient, iront toujours boire le café le matin dans la cuisine. J'apprécie toujours autant ce moment de solitude, à l'abri du bruit et de la foule, loin de la chaleur étouffante du dehors. Je me souviens d'un temps où on pouvait aller faire ses courses en été, on pouvait sortir, tout simplement. On allait faire les commissions et on s'attardait dans des "supermarchés", ancêtres des wink-shops d'aujourd'hui, où l'on règle soi-même ses courses du coin de l'œil, et où on paye en clignant des yeux.
... C'est drôle, ça, cligner des yeux. Ça me rappelle ma série favorite de ma jeunesse : Doctor Who. Il y avait un épisode où le Docteur nous disait de ne pas cligner des yeux. Et dire que l'année dernière, on aurait fêté les 100 ans de cette série... mais rien ni personne ne dure cent ans de nos jours.
Vraiment, ce matin ressemble à tous les matins. Je compare chaque élément du temps présent à celui du temps que j'ai connu. Parce qu'aujourd'hui comme hier, je me sens étranger à ce monde. Comme si j'avais été propulsé dans la mauvaise époque, comme si tout à coup, le monde autour de moi avait décidé de changer de sens, les boussoles d'indiquer le sud, et les chats de voler.
Ah tiens, Estelle sonne à la porte. Ma meilleure amie.
Depuis 55 ans.
...
Finalement, il est quand même vivable, ce monde.

Candy crush

"Objets inanimés, avez-vous donc une âme?"
J'ai récemment entendu ce vers d'un auteur inconnu. Je ne connais pas d'auteurs, pas plus que d'ouvrages, car de mémoire, je n'en ai connu aucun.
Je ne vous dirai pas tout de suite qui je suis. Car sitôt que vous le saurez, vous voudrez me tuer, me déchirer en mille morceaux. Je préfère ce moment où vous me désirez, où vous ne connaissez ni mon nom, ni mon goût. Mon destin est cruel. Chez les gens de peu de goût, très souvent on demande qui je suis après m'avoir exterminé. N'est-ce pas là un trépas ridicule? Anonyme de son vivant, dévoré sans même que notre bourreau ne nous connaisse? Qu'ai-je donc fait pour mériter cela?
Pourtant je ne fais rien de mal, au cours de mes journées. Je reste dans ma boîte, avec tous mes semblables. Ensemble on discute, de tout et de rien. Récemment on nous a installé de quoi boire le thé, puisque nous sommes anglais, parait-il. Pourtant, la seule langue que je connaîtrai sera celle de mon futur assassin, sous laquelle je fondrai, et qui prendra un malin plaisir à varier les tortures.
Le plus jeune, encore dépourvu de dents, m'inondera de bave ou me réduira en miettes. La cruauté des hommes n'attend pas le nombre des années. L'adolescent m'avalera tout cru, en douce, en cachette des parents. L'adolescente m'avalera tout cru, en douce, mais le regrettera. Elle me maudira, moi et tous mes congénères, de l'avoir rendue grosse et laide, nous, sources de tous les maux. Quel destin je peux avoir... Et plus sages seront mes pourfendeurs humains, plus discrètes se feront leurs sévices: je ne sais pas ce que je préfère au fond.
Tant de façons différentes de mettre fin à mes jours! Pourtant je suis jeune, aimerais-je te dire. De mémoire de bonbon, tu sais, je n'ai connu que toi. Parfois je vois tes amis, qui ne me choisissent pas. Fais de moi ton bonbon, ton objet, ton chouchou. Je veux être à la fois ta moitié, ton double et ton unique...
Mais dès que tu sauras que derrière le papier, il se cache un plaisir plus ou moins sucré, tu n'auras qu'une hâte, c'est d'assouvir ton besoin primaire. Non pas ta faim, car souvent tu ne me mangeras que par gourmandise. Mais celui de détruire l'objet de ta convoitise: de le cristalliser jusqu'autant que possible, avant de le casser quand tu le souhaiteras.
J'espère que tu ne fais pas subir à ceux que tu aimes les mêmes châtiments que tu me fais à moi. Mais je ne suis qu'un bonbon, je ne sais sans doute pas que l'amour des hommes ne fonctionne pas comme cela.

Parlez-moi d'amour

J'ai eu beau éplucher tous les magazines People,  les émissions de société, et même, même, oh, fou que je suis, voir s' il existait une page de man,  je n'ai pas réussi à trouver une définition de l'amour. Peine perdue ! je dois donc chercher par moi même.  Je vois l'amour comme une utopie, quelque chose qui reste comme un horizon indépassable . Petit a petit les barrières entre deux personnes qui s'aiment s'abattent, s'ébattent, s'embrassent, s'embrasent, s'entachent, s'entichent...
où en étais je?
ils sont mignons ces deux pigeons.
ah oui, l'amour.
Ces limites sans cesse repoussées doivent constituer une définition de l'amour, mais pas seulement. C'est surtout une incertitude. Un jour,  vous aurez mal, et trois secondes après vous éprouverez du plaisir. Puis le lendemain,  vous aurez mal, et deux secondes après vous éprouvez du plaisir. Et ainsi de suite. L'amour est une double-pensée: une avalanche de plaisirs, au pluriel,  et une avalanche de douleurs qui se succèdent si vite qu'on finit par se demander quelle sensation a entraîné l'autre.  La réponse à cette question, pour moi, est : l'amour. L'amour est la solution de l'équation 1+1 = 3. Ces deux signaux contraires, mais indissociables, et indissociés, provoque un sentiment que je qualifier d'amoureux. Oui, l'amour est une asymptote, quelque chose que l'on n'atteindra jamais, mais, et c'est là le plus important, quelque chose vers lequel on doit tendre, de toutes nos forces,  chaque jour de notre vie et avec tous ceux qui nous entourent.
- Alors, tu m'aimes? demandais je à l'objet de mon amour.
- Tu disais quoi?
...

Bonjour Alex

Il y a les portraits qu'on tire en quart d'heure,
Et ceux qui nous effraient, qu'on bafouille en deux heures.
Et celui de Quentun, pour ne rien vous cacher,
Fait sans aucun doute partie de ces derniers.
Quentun avec un u, à la place du i,
Car un beau jour son frère l'a nommé ainsi.
Quentun Le Mogrest. Ce pseudo ridicule
Est un anagramme de "Grotesquement Nul".
Très vite dans sa vie, Quentun a dû sciemment
Mettre "famille" au 42ème plan.
Concernant les amours, Quentun a fait un choix
Que 10% des gens vont connaître, et encore.
Et dans ces 10%, il y en a encore
90% qui ne comprendraient pas.
Quentun est un rêveur, il a la tête en l'air,
Et c'est pour ça qu'il ne sait pas peser ses mots.
Mais si vous souhaitez voir ce qu'il y a derrière,
Je vous le garantis, vous l'aurez dans la peau.

B.I.A.S (Bill et son Incroyable Avis Subjectif) - DEXTER

Voilà, l'épisode final de Dexter vient d'être diffusé. Dexter Morgan vient de frapper son dernier moustique, de manger son dernier steak, de boire son dernier café. Et moi, quand j'ai vu la fin, j'ai pleuré comme une gamine de 10 ans à qui on a volé son sac Totally Spies.
L'occasion pour moi de faire un bilan purement subjectif (vous vous en doutez).

DEXTER EST LA MEILLEURE SERIE DE CES DIX DERNIERES ANNEES.

Fin de l'article.
.....
Bon, je me suis dit qu'il fallait que je développe un peu. Mais c'est juste pour vous, hein. Et vous savez que je vous aime. #asslicking

Dexter est une série intelligente, fine, extrêmement bien étudiée, cohérente, drôle, acide, incisive, corrosive, originale, haletante, qui m'a filé des émotions et des sensations comme jamais. Si vous avez regardé la série, osez dire combien d'heures de sommeil vous avez eu après que vous avez regardé la fin de la saison 4.
Pour les autres, petit pitch : Dexter Morgan est expert en traces de sang à la section Homicides de la police de Miami. Son boulot, en gros, consiste à analyser le sang présent sur une scène de crime et à tenter, du mieux qu'il peut, de reconstituer le déroulement de ce crime à travers ces traces.
Mais Dexter n'est pas un rat de laboratoire comme les autres : il a très jeune contracté des pulsions étranges qui lui donnaient envie de tuer, suite à un traumatisme dans son enfance. Et plutôt que de devenir un criminel sans coeur, il a choisi de n'assassiner que des gens qui le méritent : un tueur en série qui tue d'autres tueurs en série, en somme.

S'en suivirent huit saisons, de qualité parfois inégale, mais souvent absolument épiques et poignantes.

POINTS FORTS :
Par où commencer... Michael C. Hall EXPLOSE de charisme. Cet acteur est excellent, il incarne son personnage à merveille, j'ai rarement vu un personnage aussi constant, aussi cohérent, aussi impactant par rapport au scénario dans une série.
Ensuite, Rita Morgan. QUELLE claque. Je sais qu'il y a de nombreux fans de la série qui n'aiment pas ce personnage, mais wow, quelle femme. C'est simple, c'est l'incarnation de mon idéal féminin. Une femme dont on pense à chaque seconde qu'elle va mourir sous le poids de sa propre fragilité, mais qui se révèle en fait un roc que rien ne semble atteindre.
De manière générale, les personnages secondaires sont d'une épaisseur hallucinante. Quasiment tous ont un vrai background, et ne se limitent pas à être des ectoplasmes gravitant autour du protagonistes, comme ça a trop tendance à être le cas dans certaines séries. Et mention spéciale aux femmes principales de chaque saison qui sont belles et impressionnantes à se décrocher la mâchoire (Rita, Lila, Lumen, Hannah...)
Enfin, les thèmes principaux sont très bien choisis je trouve, et la musique est fort agréable. Le fait que tout se passe à Miami ponctue de temps à autre les moments graves de morceaux de salsa ou de bachata qui amènent une sacrée valeur ajoutée. Mention spéciale sur le générique, qui est pour moi une preuve que, aussi bien visuellement qu'auditivement, on ne se fout pas votre gueule : intelligent, caustique, fin, une vraie démonstration.
Le cap passé après la saison 1 est à noter également. Après la première saison, je me suis dit "OK, le héros est extrêmement sympathique, mais ils en ont fait le tour." Et dès le premier épisode de la saison 2, on nous montre que non. Carrément pas. Le premier épisode de la saison 2 est un modèle, une véritable leçon en terme de production, de réalisation, d'écriture.
Que serait un bon protagoniste sans ses rivaux ? Et dans Dexter, ils crèvent l'écran ! Si Brian Moser (saison 1) ne laissera pas un souvenir intarissable, Trinity (saison 4), Miguel (saison 3), Travis (saison 6) ont une profondeur extraordinaire.
Les dialogues et le scénario enfin, sont à la limite de la perfection. Il est rare qu'on s'ennuie (mais ça arrive, j'y reviendrai) et il n'y a quasiment aucune incohérence. Et, crénom, c'est INTELLIGENT : je ne compte plus les petites références, symboles et autres clins d'oeil utilisés avec une finesse rarement poussée aussi loin.

POINTS FAIBLES:

Comme la plupart des séries américaines à succès, Dexter a galéré vers la fin. Syndrome de la saison de trop (Buffy) ? Scénaristes qui ont beau affirmer qu'ils savent où ils vont, mais on se demande (Lost) ? Toujours est-il que les deux dernières saisons de Dexter sont, à mon goût, plus ennuyeuses que le reste. Alors, évidemment, comme le niveau général de la série est très, très bon, quand c'est juste bon, on pinaille. Il faut rappeler que la saison 7 a vu apparaître le personnage de Hannah McKay, et que la saison 8 a pour guest Charlotte fucking Rampling, pas n'importe quoi en somme. Mais quand même, je me suis surpris à m'ennuyer.
La froideur du personnage peut en rebuter certains. Dexter, en plus d'être atypique, se montre parfois tout sauf humain. Il ne pleure pas une seule fois dans toute la série, et quand il montre quelques signes de faiblesse, c'est soit mal exploité, soit c'est volontairement surjoué, et dans les cas, ça sonne faux. Dommage.
Certains schémas répétitifs ont tendance à ternir l'intrigue, par moments. On sait que Dexter est un destructeur, et chaque fois qu'il tombe amoureux, il finit par, plus ou moins, tuer ou détruire l'objet de son amour. Si l'image est pour moi EXACTEMENT représentative de ce que doit être un véritable amour, le côté systématique de la chose laisse présager des passages prévisibles qui ne devraient pas l'être.
La VF est abominable. Sérieusement, je me demande encore comment ont-ils fait pour coller à Dexter une voix si différente et si peu en accord avec le personnage original.
Enfin, dernier coup de gueule mais qui n'impute pas vraiment à Dexter uniquement: les prix des box DVD sont juste indécents. Dexter est une série exceptionnelle, il y a certainement de très bons bonus, mais à leur sortie, les DVD affichent des prix qui frôlent le foutage de gueule. Heureusement, le prix baisse assez vite.


JE CONSEILLE DEXTER :
Aux gens qui ont trouvé Michael C. Hall époustouflant dans Six Feet Under.
A tous ceux qui n'ont jamais entendu parler de Dexter. Trop tard. Ils ont raté leur vie. #jacquesseguela
A ceux qui passent 90% de leur journée à se parler à eux-mêmes.
A ceux qui, à un moment où à un autre de leur vie, ont voulu se faire justice eux-mêmes.
Aux fans de Death Note. Si si, aussi incroyable que ça puisse paraitre, il y a quelques points communs.

JE DECONSEILLE DEXTER:
A ceux qui sont capables d'aller voir un film uniquement pour ses effets spéciaux.
A ceux qui s'obstineront à vouloir le voir en VF.
A ceux pour qui la vue du sang provoque des nausées : vous risquez vraiment de vomir.
A ceux qui n'arrivent pas à prononcer "Bay Harbour Butcher".
A ceux qui s'obstineront à vouloir le voir en VF. Parce que là, ça fait deux fois, et vraiment vous y mettez de la mauvaise volonté.

Voilà. Jetez-vous sur cette série, qui n'est pas vraiment, pour moi, une série "geek", mais qui bizarrement, plaira à bon nombre de geeks. Sûrement parce que comme Dexter, ils sont devenus ce qu'ils sont à travers une blessure fondatrice, qui ne se résorbera jamais, et qu'ils resteront quoi qu'il arrive avec leurs démons (ceci est un spoiler déguisé)




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B.I.A.S (Bill et son Incroyable Avis Subjectif) - GAME OF THRONES

Tiens, je me dis que je vais me lancer dans la critique de trucs et de machins sur l'Internet. J'ai l'outrecuidance de penser que ça va vous intéresser.

Et quitte à commencer un truc, je me dis qu'on va direct envoyer du lourd, et je vais vous donner mon ressenti sur la série la plus geek du moment : Le Trône de F... euh, Game of Thrones, pardon.

Conditions de regardure :
Je tiens à dire que j'ai regardé les trois premières saisons de cette série en mode "marathon", avec mon frère qui est un gros, gros fan de l'univers de George R. R. Martin. Donc ce furent des conditions un peu spéciales, à raison d'une saison par jour, en VO sous-titrée anglais parce qu'on est des vrais, des durs, des avec des poils. Et avec, du coup, ce que ça implique de spoilers plus ou moins caractérisés.

Points positifs :
Le meilleur atout de cette série, je dirais, c'est son background. C'est tout ce qui, pour ainsi dire, ne se voit pas. Les décors et paysages sont tout simplement somptueux, les costumes sont magnifiques, avec une mention spéciale pour les fois où les costumes se doivent d'être volontairement abîmés ou salis pour montrer le côté "authentique" de la chose. En particulier, j'ai vraiment ramassé ma machoîre sur les scènes du Mur (tournées en Islande apparemment) et sur le camp de Tywin Lannister, qui fait fortement penser à un camp retranché romain, et qui a juste MECHAMMENT de la gueule.
Pour continuer dans ce qui en jette, cette série a un excellent niveau d'acting. S'il n'y a pas vraiment de mauvais acteurs dans le cast (mise à part la jeune femme jouant Sansa Stark qui, je trouve, manque un peu de relief), certains des rôles principaux sont juste au TOP. J'avais déjà remarqué Peter Dinklage lorsqu'il jouait dans la série Nip/Tuck, faut dire qu'il passe difficilement inaperçu. Mais son jeu d'acteur, déjà, m'avait plu. Et là, vraiment, ça se voit qu'il se fait plaisir, le rôle de Tyrion Lannister lui va comme un gant, nul doute qu'en entendra parler de ce mec pendant de longues années encore, s'il continue à ce rythme. Je terminerai sur l'acting par le niveau absolument ahurissant qu'ont les très jeunes acteurs : la petite Maisie Williams, je le parie, sera de la pure dynamite dans cinq ans.
Et bien sûr, pour finir, je ne peux pas omettre les moments absolument épiques qu'il y a dans certains épisodes : certains personnages (Robb Stark, Tywin Lannister, Melisandre d'Asshai, Eddard Stark) sont juste complètement pétés de charisme. Les fins de saisons sont magiques, haletantes, jouissives, piquent au vif, l'avant-dernier épisode de la saison 3 est un pur mindfuck. Donc rien que pour ça, ça vaut le coup.

Points négatifs :
Oui, car pour moi il y en a.
Je vais me faire taper sur les doigts avec celui-là, mais il y a trop, trop, TROP de personnages. Je peux comprendre qu'une intrigue de guerre, avec ce que ça suppose de géopolitique et de camps, nécessite une intrigue très riche. Mais je ne compte plus les fois où j'étais en perdition devant mon écran à me dire "euuuh, mais t'es qui toi ? Mais t'étais pas avec Machin ? AH, mais c'était pas le même ? Ah mais y en a deux en fait ? Mais ils s'appellent comment déjà du coup ?". Donc bon, c'est purement personnel mais j'ai souvent perdu pied.
Pour rester dans les excès : chers amis de HBO, vous êtes coutumiers du fait (je rappelle que ce sont eux qui ont fait entre autres OzSex and the CityTrue Blood...), mais trois mots : trop, de, cul. Je ne suis pas puritain, et il en faut pour me choquer, mais là, sans être forcément choquant, y a overdose. L'époque médiévale et la vie de châteaux nécessite certainement des moeurs complètement débridées, mais pour moi, c'était pas nécessaire, et à part attirer du geek boutonneux en lui montrant qu'il y a de la chatte et du nichon, je vois pas l'intérêt. Et surtout, pas nécessaire en une telle quantité : certaines scènes sont à la limite du pornographique, et quasiment tous les personnages féminins finissent à poil à un moment donné.
Autant les fins de saisons sont épiques, autant les débuts sont VRAIMENT longs. Les deux-trois premiers épisodes, et je pense que c'est assumé de la part des producteurs, ont uniquement une visée tutorielle, introduire les nouveaux personnages, les nouvelles avancées, installer l'intrigue. Encore une fois, c'est un défaut d'une qualité : avec une telle galerie de personnages et un univers aussi développé, il est normal de trouver des longueurs. Mais malgré tout, je trouve que le "niveau" des épisodes est très inégal. Sur 30 épisodes, il y en a peut-être 10 que j'ai trouvé réellement très bons, et autant où je me suis, pour ainsi dire, ennuyé.
Enfin un dernier point léger mais non négligeable : si les décors vous en foutent plein la gueule, vos oreilles seront un peu jalouses, car j'ai trouvé la bande-son assez faiblarde. A part le thème du générique qui est vraiment très bien foutu, j'ai trouvé le reste plutôt fade.

Conclusion :
Je comprends pourquoi Game of Thrones a un tel succès, et pas qu'auprès des geeks. C'est un excellent pot-pourri de tout ce qu'on aime : il y a les codes de l'heroic fantasy sans forcément être de l'heroic fantasy (quoi que... saison 3... m'enfin), il y a de la chevalerie, des animaux, des enfants, des beaux gosses, des belles femmes, de la violence et du sexe en abondance, c'est une adaptation d'une oeuvre déjà existante, ce qui aide à constituer une sacrée fanbase, mine de rien.
Mais ce n'est pas, loin de là, la claque que je m'attendais à recevoir. Mais ça m'a fait le même coup pour Le Seigneur des Anneaux, je crois vraiment que les trucs à base de fantasy médiévale, ça sera jamais complètement ma came.

Je conseille GAME OF THRONES :
Aux rats de bibliothèque qui ont lu tous les bouquins de George R.R Martin.
A ceux pour qui Le Disque-Monde ou Le Seigneur des Anneaux, c'est la Bible.
A ceux qui aiment les histoires de chevalerie. (Le cheval, le cheval, le cheval c'est génial)
Aux quelques obsédés de la boucherie et de l'orgie. Et vous irez en enfer pour ça.
A tous les gens qui, pour tous les englober, ne sont pas des cons.

Je déconseille GAME OF THRONES :
A ceux qui ne se sont reconnus dans aucune des cinq catégories précédentes.
A ceux qui, de manière générale, onr des soucis à se concentrer.
Aux pisse-vinaigre qui ricanent chaque fois qu'ils voient un téton ou une goutte de sang.
A ceux qui se revendiquent geeks et que le truc le plus hardcore qu'ils ont vu, c'est Star Wars.
A tous les gens qui ne sont pas malvoyants et qui, quand même, le regarderont en VF.

Voilà, merci aux lecteurs zé lectrices, n'hésitez pas à partager cet article s'il vous a plu, et si vous avez des questions, suggestions, remarques, insultes, demandes en mariage... c'est en-dessous. Et je vous aime. Les autres, je vous aime aussi, mais moins, du coup.

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Credits

J'ai toujours aimé les symboles. J'y ai toujours été très attaché. Alors je remarque que lors de ma journée d'hier, je suis repassé par tous les lieux que j'ai fréquenté durant ces 5 ans. Et aussi d'ailleurs, bien que je n'ai aucune mémoire à long terme, je me souviens très exactement de ma première journée ici.

Je m'en souviens comme si c'était hier, c'était le lendemain de l'Eurovision (on a la culture qu'on peut) et le surlendemain, je devais commencer plus tôt le boulot parce qu'il y avait une livraison à assurer au Quick Part-Dieu. Ça semble une autre époque...
Mais c'est pourtant là que j'ai connu les premiers feelings positifs. J'y aurai rencontré Estelle, Dina, Peter, Camillou, et même si tout n'y était pas rose, ça valait le coup de le faire. Et il y a aussi eu Sarah. L'amour aussi passionné que torturé, qui n'aura pas duré plus longtemps que la passion et la torture réunies.
Puis l'envie de s'élever socialement. Ça aura donné le désastre Ranger France, une entreprise chargée de distribuer entre autres, Alice et Direct Energie en France. En gros, faire du porte-à-porte en costume-cravtoche chez des familles de douze à Bron ou à Vaulx-en-Velin, en leur expliquant dans un français petit nègre que tu vas leur mettre Internet dans la maison... bon, j'ai fait ça pendant 2 mois.
C'est aussi à cette époque que j'ai réveillé mon geek factor. En mai 2009 Justine m'a fait découvrir Nolife (je te remercie pas, hein ^^) et j'ai acheté mes premières consoles avec que mon pognon à moi (les PC ça compte pas). Redécouvertes de grosses tueries passées et présentes, mon coeur de vieux fan de Nintendo s'est réveillé.
Puis ça a été Ninkasi. Imaginez-vous un boulot où vous ne me verrez jamais me plaindre au quotidien de l'idiotie de mes collègues ou de l'ingratitude du taf, ça vous étonnera. Bon, je passais mon temps par contre à dire que je n'étais pas à la hauteur, ça vous étonnera moins. Mais j'ai appris plein, plein de choses et je n'aurais jamais dû partir. Mais je fais partie de ces gens qui ne progressent qu'en faisant des erreurs, et le poids de ces erreurs m'a contraint à démissionner...
C'est aussi l'époque de ma rencontre avec Anne. Je parlais de passion et de torture, j'étais loin de me douter que les choses pouvaient se répéter, de façon dix fois plus intense. Le genre de relation qui fait mal et qui fait du bien en même temps, au point qu'on se demande laquelle des deux sensations entraine l'autre. Une jeune personne extrêmement lucide et intelligente pour son âge, capable d'enflammer ou de refroidir n'importe quel mec en deux phrases. Et niveau baraque, mine de rien le stuff s'étoffe, je change de PC, j'essaie de me mettre à la guitare mais je ne trouve pas la motivation de m'y mettre bien longtemps...
Tout ça nous amène mine de rien au 1er janvier 2011, où j'essaie de raviver la flamme Ninkasi en allant à celui de Gerland, mais je n'avais clairement plus la grinta pour ce genre de choses. Et ce truc est vraiment une putain d'usine, n'y allez que si vous avez un mental d'acier.
Anne finit aussi par me larguer à cause d'une connerie / un prétexte / une erreur (rayer la mention inutile), et je me dis que je devrais commencer à voir du monde. Trois ans après s'être installé, il n'est jamais trop tard... Je trouve un boulot alimentaire chez Carrefour en février, et j'ai toutes mes après-midi et weekends de libres. Ce serait con de pas en profiter.
Après une IRL avec des lyonnais du forum de Nolife (dont une certaine Macha et un certain Rafo), une dénommée Kessy me contacte. Y aurait une asso qui se lancerait. A l'époque j'essayais un peu tout et n'importe quoi, j'avais fait une asso de lecture, un club de mah-jong... je me dis bon, pourquoi pas. Mais de loin, vraiment de loin. L'AG constitutive m'a plutôt refroidi, je me suis rendu compte que, même au milieu de geeks, je n'étais pas à ma place. J'ai revécu mes années collége-lycée en deux heures, l'amphi d'Epitech n'aidant pas... Bref, je ne relance pas vraiment le truc, je vais à peut-être une réunion.
Mais heureusement, je décide d'aller participer à l'Ota'Con et là clairement, j'ai pas eu une idée de merde. Les premiers doutes ont laissé place à des certitudes qui me montraient que j'avais trouvé en ces gens un vrai cercle d'amis, des gens qui seraient là sur la durée.
D'événement en événement, le temps se passe, les liens se tissent, et je me demande aujourd'huo comment trois années ont pu passer sans ça.
En juin 2012 ma dernière expérience lyonnaise sera dans un resto mexicain. Rien à voir avec Lyon, dira-t'on. Disons que c'est à la Cité Internationale, où habite le président de l'OL. Donc bon. Je prends, j'ai pas mieux de toute façon. Pareil pour le boulot du coup, je prends, j'ai pas mieux. Une vaste blague d'un an, qui n'aura jamais décollé. Dommage.
J'ai toujours aimé les symboles. Le plus cliché qui soit, c'est quand une vie se termine, de la voir défiler sous ses yeux.

Implosion

Je craque. C'est pas mon genre de dire ça, mais je n'en peux plus.
Il est minuit et demi passés, je sors du boulot. J'ai fait le trajet en chialant, et j'avais déjà ouvert les vannes dans les vestiaires cinq minutes avant. Pourquoi dira t'on ? Ce n'est que du boulot après tout, d'aucuns surenchériront sur ma tendance émotive / paranoïa / capacité à en faire des tonnes / mauvaise image de moi, au choix. Alors pourquoi suis-je dans un état pareil? Je ne chercherai pas la réponse à cette question: j'ai mal et il faut que ça sorte.

Aujourd'hui j'ai travaillé de 8h30 à 16h et de 18h30 à minuit. Et demain c'est pareil. La fatigue atteint déjà un niveau intolérable, la frustration s'y est ajoutée durant cette journée. J'étais le seul cuisinier de prévu sur la journée: le midi c'est un barman qui s'est improvisé cuistot, et le patron est venu nous aider. C'était tout simplement épouvantable: remontrance sur remontrance, je faisais tout de travers et quand je m'appliquais, c'était encore pire. J'ai bouclé mon service à 15h45, lessivé, complètement abasourdi de cette situation: je ne rentrerai pas dans les détails logistiques, mais comment a t'on pu me laisser seul aujourd'hui? Comment c'est possible, avec la montagne de travail qu'il y avait à faire ? Les autres sont-ils à ce point des surhommes pour encaisser une telle dose de travail tous les jours ?

J'étais loin de me douter que le pire était à venir. Ce soir, Halloween avait décidé d'être en avance d'un jour: j'ai probablement vécu la pire soirée de toute ma vie professionnelle. A peine entré dans le restaurant, des tables pleines à craquer de personnes qui attendent de pouvoir manger. Donc à peine le temps de se mettre en place, il faut démarrer en trombe. Au bout de 5 minutes à peine, le patron déboule dans la cuisine. Pour venir m'aider? Oui. Sans doute, c'est ça qu'on dira à tout le monde. Mais on retiendra surtout que si le cuisinier avait le niveau, jamais il ne serait intervenu.
J'ai essuyé les platres. C'est simple: je suis revenu plusieurs mois en arrière, je redeviens un débutant. TOUT, absolument tout ce qu'on m'a appris depuis quatre mois ici est bidon. Ceci ne se range pas comme ça, ceci ne se range pas dans cela, ni avec ceci, et quand on fait ceci, on fait d'abord cela alors que, depuis 4 mois, je fais exactement l'inverse parce que c'est comme ça qu'on me l'a expliqué.

Je comprends ce que ressentent les membres du Parti Intérieur dans le monde de 1984. La double-pensée est quelque chose de déchirant, de terrassant, à en devenir fou: être persuadé d'une chose et de son contraire, même pas à qui mieux-mieux, les deux en même temps; les deux sont et seront toujours vraies en même temps.
La soirée s'est terminé par une séance d'humiliation à n'en plus finir: une liste de choses à faire pour le lendemain, sur papier, numérotés avec "N°1, N°2, N°3..." (jusqu'à N°10, ma journée de demain me fatigue déjà), et des tonnes de plats à récurer, nettoyer, rincer, jetés à la poubelle parce que pas rangés danss la bonne boîte par le cuisinier de la veille...

Non, j'en peux plus. C'est pas mon métier et ça ne le sera jamais. J'ai envie de les planter, demain de poser ma démission: mais je ne peux même pas le faire, ça serait du suicide, je remonte à peine la pente! NON, ça ne devait pas se passer comme ça! La pente j'étais censé la remonter! Ca fait 5 ans que je dois la remonter, cette putain de pente! Pourquoi j'ai l'impression de la dégringoler quatre à quatre ? Je n'en veux plus de cette vie faite de réponses en "rien". Où sont mes parents ? Morts, parce que tu n'as RIEN fait pour les en empêcher. Où sont mes amis ? Loin des yeux, trop loin des yeux, putain Edwige j'aimerais juste en ce moment te serrer dans mes bras, tout ça parce qu'à un moment,  j'ai RIEN trouvé d'autre que de fuir. Où sont mes diplômes, ma fierté, mes réussites ? Rien, rien, et encore rien.
Cette soirée à fait exploser ce qui tenait encore à RIEN. Le meilleur moment de la soirée (mais aussi, en un sens, celui qui a fait le plus mal) est sans doute d'avoir croisé Cyr sur le trajet. Et avec qui j'ai eu une conversation de type sur le trajet. Mais bordel, j'avais qu'une envie c'est de revenir sur mes pas, en arrière, parce que j'avais pas envie d'y aller, et de dire "allez mec, viens on va se prendre un verre, de toute façon toi comme moi on a trop de trucs qui veulent exploser en ce moment alors ça peut se régler qu'autour d'alcool ou de coups de poings, et j'ai pas de sac de frappe à la maison". Et j'ai fait quoi? Devinez. Rien: je suis resté avec mon sourire de façade qui traîne toujours entre deux phrases.

Je sais pas où j'en suis. Je vais pas leur poser ma démission tout de suite, ça serait agir sur un coup de tête: je sais juste que dans 7 heures, je prendrai le chemin du boulot, avec le visage d'un animal qu'on amène à l'abattoir. Et quoi qu'on en dise, c'est loin d'être le meilleur état d'esprit pour travailler.

R.T.T

C'est étonnant comme les certitudes peuvent se bouleverser en quelques secondes. Ce devait etre à coup sûr une journée longue mais lassante. Prenez un clash banal avec un manager, influencé par une démission dans un fast-food moyen de province, et la journée devient plus courte et plus complexe.

Quick Part-Dieu, fini. La peur des souris dans les bacs, terminé. Les huit-gros-moitié, oublie. Et bizarrement, avant ce dimanche soir pourri, j'étais presque triste d'en finir avec ces quatorze mois de décrépitude sociale et physique. Suffit pour justifier les derniers termes pompeux, de voir que j'ai pris quelques kilos et que je ne me suis jamais senti aussi bête en un an.

Parce qu'à la base, j'y ai rencontré quoi, qui ? Des gens qui s'estiment plus intelligents que les autres parce qu'ils commencent leurs phrases par "je veux que" ? C'est vrai qu'on a tout de suite l'air plus sûr de soi. En tout cas on a l'air imposant face à des clients, personnes qui, faut-il le rappeler au passage, vivent quant à eux dans un monde où toutes les portes sont ouvertes et où le simple fait de pousser un bouton avant d'ouvrir une porte leur parait impossible.
Des curiosités de la nature en tout genre. Et là, étrangement, je devrais pousser l'orthographe en écrivant "curiositées" de la nature, tant les jeunes femmes que j'y ai vu m'ont intrigué. J'ai longtemps cherché à comprendre d'où venaient tant d'expressions batraciennes dans le regard de ces filles : est-ce le fait de manipuler de l'argent qui influence leur caractère vénal inhérent, et ce tous les jours ? Probablement, en tout cas je me suis résolu à le penser.

J'en fais un peu ! Evidemment, je viens de planter l'équipe en plein rush sous le coup de la colère, relisez le haut de l'article, bande de nuls...

Je m'engage à présent dans quelque chose que je ne maîtrise absolument pas. Là, il ne s'agit pas d'élever la voix pour montrer qu'on assure mieux que les autres dans la confection des Quick'n'Toast. Etre VRP, c'est Vraiment Récolter le Pognon. Surtout chez Ranger. Si je veux en avoir, il faudra que je me donne à 100 % en permanence. Issam, mon manager, m'a donné un exemple probant vendredi. Les clients que je vais voir sont tous des bouleversés ! Ils sont en train de manger, de dormir, de discuter, lorsque tout à coup, un homme en costume vient frapper à leur porte ! Et le bouleversement n'aime pas l'hésitation, n'aime pas le flou. Il veut de la poigne, de la confiance en soi, tout ça compris dans le pack à 29.95€.

Et en ce dimanche soir, j'écoute, une fois de plus, Katie Melua chanter. Elle reprend une chanson de Jeff Buckley : Lilac Wine. Elle chante qu'elle s'est perdue dans une nuit fraîche et humide, qu'elle était hypnotisée par une grande joie étrange. Je souris, partageant sa joie. Elle descend dans les graves, les larmes me montent aux yeux. Elle se confesse, derrière le piano : "quand je pense plus que je ne veux penser, je fais des choses que je ne devrais jamais faire. Je bois beaucoup plus que je ne devrais boire parce que ça me ramène près de toi." Et moi de lui répondre par la pensée : chante, chante encore, ne t'arrête surtout pas de chanter, et buvons ensemble ce vin fait à partir de lilas, qui s'il est doux et capiteux, nous rend malgré tout instable au point de vouloir tout quitter.

Quitter le coeur gros cette poignée de personnes qui, à leur échelle, ont reconsidéré une partie de l'opinion que je me faisais de la société : incarnations du positif (pour la périphrase, elle se reconnaîtra, enfin si elle écoute son répondeur) ou lieux vivants d'énergie affective (même parenthèse), certains d'entre vous m'ont marqué par leur caractère, leur façon d'être. J'imagine que dans un an, je vous aurais pour la plupart oublié, mais le futiliste se croit important parce qu'il voit le bout de son nez, alors je vais envoyer les compliments par ordre d'apparition à l'esprit.

YPBM. Je m'en suis toujours voulu de ne pas extérioriser plus que ça, statut de manager oblige, le respect que tu m'inspires. Ce que je t'ai dit en te quittant est sincère : tu cultives le paradoxe comme j'ai toujours voulu le faire, mélant cette fausse image de langue de pute que d'autres langues de pute t'attribuent (en tout cas, moi j'ai marché) et une franchise bien ciblée. Même pour un homo, c'est pas mal ! (Pour te copier, à cet endroit je mettrais : Rires !)

CR. Le vouvoiement imposé par le contexte en devient presque absurde après les galères qu'on a traversées. Qui va me réveiller à 6h du matin par un "bonjour !" qui redynamiserait un troupeau de personnes âgées dopées au Xanax ? Franchement, vous devriez bosser dans l'animation, vous y avez votre place !

Caro. Et non pas Caroline ! Mais plus jamais je ne t'ai appelée comme ça, tant le côté exotique du diminutif te va à ravir, comme s'il t'estampillait le côté brésilien que tu possèdes dans tes origines. Quelqu'un de complexe, qui peut en une heure être irrésistiblement insupportable et insupportablement irrésistible. Enfin, je t'apprécie beaucoup, quoi. Pas besoin d'en dire plus.

Dina. Je remercie la faculté de Lyon I pour avoir fait que tu habites à côté de chez moi, sinon je n'aurais jamais eu l'idée de te raccompagner, et de te connaître ! Reste la même, surtout, pétillante et vénéneuse en même temps : je n'aime pas les filles gentilles de toute façon!

Le couple Boucamus. Franchement, vous déchirez. Tous les deux. Et les mecs géniaux se marient un beau jour avec les nanas géniales, c'est comme ça que le monde devrait fonctionner. Longue vie au petit Camuy ou à la petite Akané et à vous les futurs parents!

Maëlle. Peut-être une vraie chance d'amitié durable. En tout cas j'y crois à mort. Le fait que je me sente mal si je ne t'ai pas appelé de la semaine me le montre bien. Tu es la plus jeune amie que j'ai, mais malgré ça j'ai plein de choses à te dire... Fais fi des conversations de salon et fonce ! Surtout, fonce. Tu n'as pas de temps à perdre avec certaines personnes. Je me comprends...

Et tous ceux que j'ai pris dans mes bras parce que même si je ne pourrais leur passer de la pommade pendant quatre ou cinq lignes, à leur manière ils ont rendu ces quelques mois plus agréables :

Siham, Emeline, Tatiana, Lauren, Joey, Gauthier (j'aurais bien voulu mais je me suis barré avant...), Estelle, Aurore, Delphine, Aurélie, Doriane...

Je ne vous oublierai jamais ! Je pense qu'il y a deux cons sur trois personnes, bonne nouvelles, vous êtes tous des troisièmes personnes !

MERCI A TOUS.

L'île de l'ostentation


(Merci à Aurélien Daimé, jeune philosophe prometteur, pour ce titre)

Bienvenue sur cette planète vouée à l'explosion.
Dans une banale crise de larmes, je vais vous présenter ses habitants, ceux qui y vivent, et les programmes qui les mettent en marche. Cette planète est la résultante de dizaines d'années de nonchalance, de manque de considération. Les illuminés n'ont pas voulu se taire, n'ont pas pu être éliminés, et leurs idées farfelues sont devenues des dogmes, et font aujourd'hui légion. Leurs détenteurs sont devenus les diffuseurs d'une nouvelle société où les codes sociaux ont creusé les extrêmes : les plus beaux sont restés les plus beaux, et on a tout fait pour qu'ils deviennent encore plus beaux. Quitte à enfoncer les autres.

Ici, la politique n'existe plus. Elle a été ignorée au fil du temps pour finir par être oubliée : pas de partis qui tiennent, pas d'électeurs, et pas d'élus : le seul élu que l'on plébiscite est l'élu de son coeur. Celui qui fait voler des papillons dans mon ventre, qui me transporte. Mon double, ma moitié, mon unique. Celui que j'affiche le plus clairement possible pour me protéger.

C'est la dictature de l'apparence, de l'intime. Tout est sexe. Les concepts d'artiste et de mannequin ont disparu. Toute forme de concept renvoyant à ces notions archaïques est regroupée dans une catégorie sociale : les plaiseurs.

Cette élite sociale s'amuse et vise à s'agrandir : tout le monde veut l'être. Ces gens-là passent du temps dans les boîtes de nuit, chaque soir, à chercher leur cause de sommeil post-coïtale parmi ceux et celles qui dansent. Ceux et celles, car ce que l'on appelait bisexualité par le passé est devenue la sexualité aujourd'hui. On la conçoit d'ailleurs comme la recherche du plaisir et par l'expression de la réussite quand il est trouvé.
Les plaiseurs ont des dizaines de partenaires sexuels par an, et ils sont les seuls capables d'avoir une vie sexuelle légitime.

Dictature de l'affect, aussi donc. Dans un tel système, la critique morale n'est plus concevable : si tu n'es pas d'accord avec moi, je te reproche tes défauts physiques. Et ces défauts font que j'ai raison. A tous les coups, tu es un déplaiseur, une personne dégoûtante : tes kilos en trop ou tes centimètres en moins te placent hiérarchiquement inférieur à moi. Il était grossier de ta part d'exprimer ton opinion : si la tienne diverge de la mienne, c'est que tu me détestes, pas autre chose. Alors je te déteste, et je t'élimine parce que tu veux me tuer.

Tout est sexe, disais-je. Les vidéo-clips sont des courts-métrages érotiques, les média sont devenus de gigantesques machines à se branler. Les magazines féminins sont truffés de pages de sexologie, et ne contiennent désormais plus que cela et la rubrique beauté et soin.
Car les femmes de cette planète ont compris qu'elles avaient l'avenir pour elles : dans l'ancien temps, les hommes les ont malmenées, réduites en inférieures, bafouées. Il était temps pour elles de prendre leur revanche et de devenir à présent le sexe fort. Vous l'avez compris, la planète est une terre qui a subi une féminisation de la société. Car l'homme s'y est lui-même réduit à sa fonction hormonale, en laissant disparaître, génération après génération, ses facultés de jugement intellectuelles, et tout ce que son esprit contenait de moral. Il devient un ensemble de terminaisons nerveuses qui libère des endorphines en permanence.


Je ne veux pas vivre sur cette planète. On n'y est pas encore, mais la caricature a juste un peu forcé le trait. Regardez simplement dans la rue! Ces automatismes débiles qui me dégoûtent... Mais arrête de tourner la tête à 180° comme un crétin ! C'est juste une femme que tu viens de voir passer ! ARRETE ! Mais arrête ! A quoi tu penses quand tu fais ça ? Tu ne te contrôles pas ? Il te suffit de poser tes yeux sur une zone graisseuse de son anatomie pour te réduire en bouillie... Regarde-toi, regarde-toi le plaiseur, celui qui drague, celui qui domine le monde, le dernier rempart de l'humanité sur cette planète. Regarde-toi lâcher ta bave, tel un éjaculateur précoce, que je regarde ton voisin faire la même chose.

Et toi donc, le concentré de vulgarité ambulant. A quoi tu passes tes journées ? A la pornographie suggérée. Tu vas t'acheter des macarons parce que tu as lu quelque part qu'un orgasme faisait éliminer son équivalent en calories ? Fantastique. C'est pour ça aussi que tu manges de la viande épicée et que tu fais de l'équitation, pour rien d'autre j'imagine ? Et tu traines sur Facebook, sur Twitter, et autres phagocyteurs de la jeunesse, à balancer des photos. De toi, de toi et encore de toi. De toi, le centre du monde. Et deux jours après avoir rencontré un tas de testostérone ambulant, tu en fais ton identité. On ne te voit plus être, tu n'existes que par lui...

Et voilà deux centres du monde qui mettent par courants de convection sur le même piédestal. L'un parle de l'autre dans les trente premières secondes de toutes ses conversations, pour se protéger.

L'ostentation, toujours : celle qui fait que quoi qu'on fasse, on le fait en hurlant. Car voilà, au-delà de toute caricature grossière, ce qui nous attend. Une oreille humaine qui n'entend que cris et gémissements, un oeil qui ne voit que stupeur et tremblements. Partout. Car ils se sont habitués à une certaine intensité de son et d'image, alors pour les faire répondre, on tourne à fond le bouton. Jusqu'où ? Jusqu'à ce qu'il soit en permanence à onze sur dix dans l'amplification, et que la sensation d'orgasme en elle-même nous paraisse banale.

Alors de grâce, à vous tous les plaiseurs, laissez-moi. Laissez-moi être différent et refuser ce monde. Ne vous déplaise. Mais ne venez pas sortir des sentiers battus, parce que désormais, officiellement, ces sentiers sont ma planète.



Infinitif

Un an.

Un an a passé depuis que j'ai découvert Lyon. C'est difficile à réaliser aujourd'hui, tant je me sens accoutumé à la vie d'ici. Encore plus difficile de penser qu'il y a un an, j'étais en bas, tout en bas de la côte.

En bas comme on peut l'être quand on ne sait pas où on va. Le 4 février au soir, je m'endormis à Paris pour la dernière fois : je vivais en colocation à la Porte d'Italie. Chez une dame polonaise du double de mon âge. Ca vous paraît bizarre ? A moi aussi. Mais à l'époque, c'est tout ce que j'avais trouvé, j'y reviendrai dans mon traité stroboscopique qui s'appelle 21h34.

Le lendemain donc, j'emménageais chez mon frère. Vivre à deux dans un studio de 25 m² pour une durée indéterminée. J'emmenais ma vie dans des sacs qui avaient déjà connu bien des lieux, et quelque part dans la poche d'un de ceux-là, un aller-retour pour Lyon. J'avais décidé de changer de vie, changer d'endroit, prendre une putain de gomme et tout effacer d'un coup. Mais je rassure certains et certaines, il y a des noms qui sont écrits au feutre indélébile.

Et à peine un an a passé, et je suis devant mon PC, sur FaceBook, à raconter des histoires pour des gens dont je ne soupçonnais même pas l'existence il y a quelques semaines pour la plupart. Et qu'est-ce que j'ai connu en douze mois ?

Les quatre jours passés pour trouver un appartement. L'énorme puissance ressentie en descendant du train, dans ce lieu magique car inconnu, avec un métro jamais vu, des rues jamais vues, ... un sentiment rarement ressenti qui me coupait le souffle.

Les conversations échangées dans l'auberge de jeunesse du vieux Lyon ; première nuit à Lyon de surcroît. Le téléphone en rade de batterie, les appels passés depuis le couloir, assis sur une chaise volée au préalable dans la chambre. Appeler qui ? Les collègues du KFC. Ouais, je suis bien arrivé, ouais. Tout se passe bien, ouais. Ouais, ouais... Je sais surtout pas ce que je fous là, bande d'andouilles.

La sensation étrange d'avoir pris des habitudes dans un lieu encore à peine connu : les délires de prendre en une journée tous les transports publics possibles et imaginables, vouloir tout sentir, vouloir rester éveillé pendant trois jours...

Mes réflexions dans Lyon qui s'intensifiaient ! Pour la première fois, j'avais l'impression de gérer quelque chose : un bout de papier, des numéros, un cyber-café, un stylo ! J'allais d'appartement en appartement, combien en ai-je visité ? Cinq, quinze, vingt ? Aucune idée. L'envie de signer un bail dans la foulée en trois jours ! J'avais rendez-vous dans une agence cinq heures avant le départ de mon train pour Paris.

Le retour à Creil, chez le frangin ataraxique, avec la sensation d'avoir accompli quelque chose. Les journées défilant, toutes aussi anonymes les unes que les autres, j'ai encore du mal à penser que j'ai passé un mois là-bas. Mais j'avais besoin de ce réconfort de choses connues, routinières, familières. Même les engueulades de jeunesse ! La peur, voyant la possibilité de louer l'appartement s'éloigner pour raisons de discrimination financière. Le soulagement quand une certaine Natacha passait en deux minutes d'une inconnue dont je ne me rappelais pas avoir visité l'appartement, à une future colocataire de trois mois dans le quartier de la Part-Dieu. La vanne de moi à moi : "ben dieux, t'aimes ça les colocs !"

L'arrivée à Lyon, 5 mars, chargé comme une mule, sous la neige. Un symbole, pensé-je. De quoi au juste ? La journée-marathon passée à acheter un matelas et une chaise de fortune, que je détaillerai également.

Quinze jours à vivre comme un clochard dans un appartement du 6ème arrondissement, faut le faire quand même ! A chercher du travail, tout sauf les fast-foods ! Tout sauf les fast-foods... Besoin d'argent rapide. Cinq jours, dix jours, quatorze... CV à Quick. Quinze jours. Embauche. C'est reparti pour un tour, je me fais asocial et éxécrable à souhait et me fous tout le monde à dos.

La rencontre avec Siham. Jeune fille extraordinaire : empathique, généreuse, mignonne, intéressante, cultivée... La liste des qualités de cette fille qui détruit le Billy apathique. Transformation en clown. Les gens : des managers,qui me pompent l'air, Silvestre, Bougaci. Des équipiers qui me gonflent, Cudrax, Pelletier. Des mecs intéressants. David, Yvan-Pierre, Cédric, Mathieu les deux, Romain les deux, d'autres que le temps a effacés et efface encore. Des nanas intéressantes : Mag, Lucile, Maude, Emeline, Aurélie, des Marine, des Caroline tout plein tout plein, d'autres que le temps a effacées et efface encore.

Des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, une crise de nerfs, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, une manageuse qui devient "l'agent spécial Regnat", des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, tiens ! Un nouveau pilier, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers,

Sarah. Un été de tendresse, de passion, comme tous les adolescents boutonneux en rêvent. L'amour me transforme et me donne des ailes. Envie d'acheter, des choses inutiles mais qui améliorent le quotidien du futiliste. Le compte en banque plonge, je travaille plus pour gagner plus.

La rupture avec Sarah, aussi rapide que de bouffer un Quick'N'Toast. La prise de conscience que le putain de calendrier affiche septembre, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, de la musique, encore et encore, des vagues d'équipiers qui n'en finissent pas, avec une dans le tas qui me plait énormément...

Des achats qui blindent mon appartement, des recherches d'emploi infructueuses. Une journée de fiasco notoire dans la boulangerie Pain Benoît. Un entretien initiateur d'illusions chez Hästens. Moi, vendre des matelas qui coûtent 10 000 boules ? Tu parles, Charles ! Continue à produire des Giant, et sue bien, surtout, ça élimine les toxines.

Des burgers, des burgers, des burgers, des cris poussés dans les chambres froides pour décompresser, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers,au secours, je n'en peux plus de ces maniaques de l'autorité !! des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, Marie, tu fais quoi samedi apres-midi ? On se voit à Bellecour! des burgers, des burgers, des burgers, des burgers, la fin de l'année passée comme un éclair qui sembla pourtant durer une éternité, des burgers, des burgers, des burgers,

Des gens que je veux revoir. Encore. Plus tard. Ils sont partis, d'autres sont toujours là à trimer.

Et ceux qui sont des réseaux à eux seuls, des concentrés de certitudes? Ceux qui seront là quand je relirai cet article en le prenant pour une erreur de jeunesse. Des gens que j'aime, qui me font pleurer quand je les serre dans mes bras, dont la seule absence, ne serait-ce qu'une semaine, m'empêche de dormir. Une solitude qui n'en finit pas non plus, mais qui semble s'inscruster durablement et apparaître comme un compromis, l'envie que ça change ! L'envie que ça dure ! La liesse, encore ! Non, pas la liesse, le désespoir...

Que me réserve l'avenir ?


Des burgers ?



ALLEZ !!!